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Autodafé

Scènes 36 à 67

SCENE 36
ROMAN
GRANDE RUE DESERTE - EXT/JOUR

[On « voit » ce qu’écrit Olivier]

La scène du roman d’Olivier se déroule dans une grande rue déserte en pente. Il est tôt le matin. En bas de la rue, il y a un café avec une ou deux tables en terrasse. A l’une des tables est assise ANNIE qui a les traits légèrement rajeunis de LA CONCIERGE.

ANNIE semble attendre. Elle fume nerveusement une cigarette. Machinalement, elle jette un coup d’oeil à l’intérieur du café. Dans la pénombre, on distingue DEUX HOMMES accoudés au comptoir. Ils lui tournent le dos. Leur présence semble susciter chez ANNIE un surcroît d’inquiétude. Elle tire une ou deux bouffes sur sa cigarette, regarde la rue, puis l’intérieur du café. Un des DEUX HOMMES se retourne vers elle.

ANNIE prend peur. Elle guette le haut de la rue avec anxiété et se demande ce qu’elle va faire.

Bientôt, en haut de la rue, apparaissent PIERRE et MICHEL [ce dernier a les traits de GILLES, le gymnaste]. Ils marchent d’un bon pas vers le café. Ils ont rendez-vous avec ANNIE.

ANNIE, de plus en plus nerveuse (elle craint que les DEUX HOMMES au comptoir ne soient des membres de la Gestapo), voit avancer PIERRE et MICHEL. Comment éviter l’irréparable ?

PIERRE et MICHEL descendent toujours la rue. Ils ont aperçu ANNIE mais ne lui ont fait aucun signe.

Les DEUX HOMMES se tiennent maintenant sur le pas de la porte du café.

ANNIE se décide enfin à tenter le tout pour le tout. Elle ramasse rapidement ses affaires puis, d’un bond, se lève et descend la rue en courant. Immédiatement, un des DEUX HOMMES la prend en chasse et la rattrape bientôt. Elle est arrêtée.

Pendant ce temps, PIERRE et MICHEL rebroussent chemin et s’enfuient. L’autre HOMME se lance à leur poursuite mais ne parvient pas à les rattraper.

SCENE 37
AMPHITHEATRE - INT/JOUR

OLIVIER et NATHALIE sont assis côte à côte et assistent à un cours. OLIVIER achève l’écriture de son chapitre et referme son cahier. Il redresse la tête. NATHALIE se penche vers lui.

NATHALIE
(À voix basse) Qu’est-ce que tu écris ? Un roman ?

OLIVIER
Oui...

NATHALIE
Tu me le feras lire ?

OLIVIER
Oh !... Il est loin d’être fini !

SCENE 38
IMMEUBLE OLIVIER - INT/JOUR

OLIVIER rentre chez lui. Devant son immeuble, s’est formé un petit attroupement. Une ambulance est stationnée devant l’entrée. LA CONCIERGE est là, discutant avec les badauds. OLIVIER s’avance vers elle.

LA CONCIERGE
Oh ! Monsieur Alphandéry ! Quel malheur !

OLIVIER
Qu’est-ce qui se passe ?

LA CONCIERGE
C’est Monsieur Picard, votre voisin... Ça faisait trois jours qu’elle n’entendait plus son violon... C’est Madame Béziers qui m’a prévenue...

OLIVIER
C’est vrai, oui...

LA CONCIERGE
J’ai frappé à sa porte tout à l’heure. Personne. J’ai appelé le serrurier. Vous savez ce que c’est, avec les vieilles personnes, on ne sait jamais. Malheur ! Il était sur son lit, tout blanc. Mort. Bouh ! Je suis toute retournée !

Deux AMBULANCIERS sortent de l’immeuble portant Monsieur PICARD sur un brancard. Ils se fraient un passage au milieu des badauds. OLIVIER, blême, le regard vide, le suit jusqu’à l’ambulance.


SCENE 39
SORTIE CINEMA - EXT/NUIT

OLIVIER, NATHALIE et NICOLAS sortent d’une séance de cinéma. Ils marchent côte à côte dans la rue.

NICOLAS
Moi, j’ai pas du tout accroché...

NATHALIE
Tu rigoles ! C’est un chef-d’oeuvre !

NICOLAS
Un chef-d’œuvre... tout de suite !

NATHALIE
(À Olivier) T’es pas d’accord avec moi ?

OLIVIER
Si... C’est vraiment un très beau film.

NICOLAS
Eh ben, moi, j’ai pas du tout accroché. J’ai le droit, non...?

À partir de ce moment, OLIVIER va se détacher de ses amis et marcher de plus en plus devant eux.

NATHALIE
Oh, toi... de toute façon, tu n’aimes que les films comiques.

NICOLAS
C’est pas vrai. J’aime les films où j’accroche, c’est tout !

NATHALIE
C’est bien ce que je dis, tu n’accroches qu’aux films comiques...

OLIVIER est très gêné par la dispute de ses amis. Il les devance de plus en plus.

NICOLAS
Tu dis n’importe quoi !...

NATHALIE
Mais si. Toi, il te faut la bonne grosse rigolade.

NICOLAS
J’ai quand même le droit de pas me faire chier au cinéma !

NATHALIE
Parce que tu t’es fait chier, là...

Maintenant, OLIVIER marche quelques mètres devant le couple qui s’agite. Son visage devient grave et douloureux.

NICOLAS
Parfaitement ! J’t’avais dit que ça me plairait pas...

NATHALIE
Ah, bien sûr ! Si tu vas voir un film en te disant à l’avance que ça te plaira pas !

OLIVIER entre en lui-même pour ne pas entendre la dispute de ses deux amis. Leurs propos deviennent lointains.

NICOLAS
C’est toi qui as voulu que je vienne...

NATHALIE
Je voulais qu’Olivier voie ce film.

NICOLAS
Eh ben, t’avais qu’à y aller avec lui !

Maintenant, OLIVIER marche très en avant du couple dont on ne comprend plus la dispute...

SCENE 40
REVE
LONG COULOIR - INT/JOUR

[On « voit » le rêve d’Olivier]

Le rêve se déroule dans un très long couloir. A une extrémité, une porte (qui fait la largeur du couloir) ; à l’autre extrémité, une fenêtre qui éclaire le couloir ; à côté de la fenêtre, sur le mur, une porte. Les deux murs sont couverts d’étagères pleines de livres.

La porte près de la fenêtre s’ouvre. OLIVIER apparaît en costume sombre. Il porte un dossier. Il entre dans le couloir. Il est impressionné par la quantité de livres entassés sur les étagères.

Il commence à avancer dans le couloir. Lentement.

Soudain, il entend un craquement. Il s’arrête un court instant puis reprend sa marche. Désormais, il est sur ses gardes.

Derrière son dos, il entend un livre tomber. Il commence à hâter le pas. D’autres livres tombent derrière lui. Il accélère encore son pas.

Puis, comme dans une fameuse scène du film d’A. Hitchcock, Les Oiseaux, les livres se mettent à l’attaquer. Ils quittent leurs étagères et fondent sur lui. Il se met courir. Les livres heurtent sa tête. Il se protège du mieux qu’il peut avec le dossier. Tous les livres sont à sa poursuite.

Il finit par arriver à la porte au bout du couloir. Il l’ouvre et la referme difficilement. Les livres viennent s’écraser sur la porte et la percent.

SCENE 41
CHAMBRE OLIVIER - INT/NUIT

OLIVIER pousse un hurlement de terreur qui le réveille. Il est tremblant et en sueur. Il allume la lumière.

Il regarde sa bibliothèque. Toutes les étagères ne sont pas encore remplies. Quelques livres sont sagement alignés.

De nouveau, il entre en conversation secrète avec sa bibliothèque.

SCENE 42
STADE -EXT/JOUR

OLIVIER et NATHALIE assistent à un championnat universitaire d’athlétisme, auquel participe NICOLAS. Ils sont assis côte à côte dans la tribune. Non loin d’eux est installé GILLES, le gymnaste. Ils échangent un salut avec lui.

On les retrouve après quelques vues des différents concours.

NATHALIE
Je me demande ce que je fais là... Tout ça pour assister aux exploits de « monsieur ». Et en plus, on se caille.

OLIVIER est surpris par l’agressivité de NATHALIE.

NATHALIE
Tout dans les jambes et... Et merde, tiens !


NICOLAS vient d’entrer sur le stade avec d’autres COUREURS. Ils se dirigent vers la ligne de départ et commencent à retirer leurs vêtements selon un rituel lent et minutieux sur lequel on insistera. La rumeur du stade s’estompe peu peu. Les sons deviennent feutrés. La voix de NATHALIE prend soudain un relief particulier.

NATHALIE
On s’est disputés, hier. Comme l’autre soir. Encore cause d’un film.

OLIVIER
Quel film ?

NATHALIE
Trop compliqué pour lui. Y’avait pourtant rien à comprendre. On regarde et c’est tout.

OLIVIER
C’était quel film ?

NATHALIE
C’est vraiment dramatique un type pareil. Il n’a rien dans la cervelle, tu peux pas t’imaginer... Si... Un chronomètre. Voilà. Ce mec, c’est un chronomètre et une paire de jambes...

Après s’être un peu échauffés le long de la piste, les COUREURS viennent prendre leurs places dans les blocs de départ.

OLIVIER
Qu’est-ce que tu vas faire ?

NATHALIE
Attention, ils vont partir...

Au coup de feu, les COUREURS s’élancent. NICOLAS prend la tête tout de suite. Il ne la lâche pas jusqu’à l’arrivée.

NATHALIE applaudit très fort sa victoire.

SCENE 43
CHAMBRE NICOLAS - INT/JOUR

OLIVIER rend visite à NICOLAS, au saut du lit, dans la petite chambre qu’il occupe au campus. La décoration intérieure révèle son goût pour l’athlétisme. Beaucoup de posters et d’accessoires de sport de toute nature. Un plateau de petit déjeuner, avec deux tasses, traîne sur le lit.

OLIVIER, dont la tenue s’est encore décontractée, est planté devant une affiche représentant un parachutiste en plein saut.

OLIVIER
Tu fais aussi du parachutisme ?

NICOLAS
Un peu, oui... Pourquoi ? Tu veux en faire ?

OLIVIER
Non, c’est pour mon roman...

NICOLAS
Ah, oui...

OLIVIER
J’ai deux personnages qui sont largués en zone libre en parachute. Il faudrait que tu me dises quelles impressions on ressent.

NICOLAS
C’est fantastique.

OLIVIER vient s’asseoir sur le bord du lit et finit sa tasse de café.

OLIVIER
Qu’est-ce que ça fait exactement ?

NICOLAS
Je sais pas, moi. T’as une frousse pas possible et en même temps, tu te sens bien, tu vois ?

OLIVIER
C’est-à-dire ?

NICOLAS
T’as de ces questions !... Tu plonges dans un trou mais t’as pas l’impression de tomber... Pas tout de suite... Enfin, si, tout de suite, tu l’as... mais après, tu l’as plus. Tu comprends ?

OLIVIER
Oui...

OLIVIER se tait un instant puis se lève et regarde de nouveau les posters au mur. Puis il va vers la fenêtre.

OLIVIER
Mon voisin est mort.

NICOLAS
Celui qui faisait du violon ?

OLIVIER
Oui. Peu peu, il a perdu toute son énergie, comme s’il se vidait de l’intérieur...

NICOLAS
C’est con.

Un long silence pendant lequel OLIVIER regarde NICOLAS droit dans les yeux avec insistance, comme s’il voulait lui dire ou lui faire comprendre quelque chose.

OLIVIER
Oui.

SCENE 44
ALLÉES DU CAMPUS - EXT/JOUR

Après un cours, OLIVIER et NATHALIE quittent un des bâtiments de la faculté et se dirigent vers les bâtiments où logent les étudiants.

NATHALIE
Il parle de quoi ton roman ?

OLIVIER
De l’occupation allemande.

NATHALIE
Ah bon ?! (Après un temps) Ça me fait très peur, la guerre. Tu ne peux pas imaginer... Penser que des gens comme toi, comme Nicolas, pourraient partir un matin, et aller se faire tuer... Pour une connerie...

Dans une autre allée du campus :

NATHALIE
Ça me tenterait d’écrire. Mais j’ai la flemme. Et puis je ne sais pas inventer des personnages. Comment tu fais, toi ?

OLIVIER
Je ne les invente pas. Je les prends dans les gens qui m’entourent...

NATHALIE
Alors, je suis dans ton roman !?

OLIVIER
(En souriant) Pas encore, non.

Dans une autre allée du campus :

NATHALIE
Tu penses pouvoir en vivre, de tes romans ?

OLIVIER
Pourquoi pas ? Mais, en même temps, je n’ai pas envie de ne faire que ça...


OLIVIER et NATHALIE arrivent à l’allée qui mène aux bâtiments où vivent les étudiants. NATHALIE aperçoit NICOLAS.

NATHALIE
Oh, super ! Regarde, Nicolas a eu sa nouvelle moto !


NICOLAS est accroupi devant le moteur d’une superbe moto aux chromes rutilants. En apercevant OLIVIER et NATHALIE, il se relève et les salue de la main.

OLIVIER et NATHALIE arrivent à sa hauteur. Baisers, poignée de main...

NICOLAS
Elle en jette, hein ?

NATHALIE
Superbe.

OLIVIER et NATHALIE tournent autour de l’engin. NICOLAS les suit du regard et savoure leur émerveillement. NATHALIE se penche sur le compteur de vitesse.

NATHALIE
Eh ben, j’avais déjà la trouille avec l’autre !

NICOLAS
(À Olivier) Tu l’essaies ? T’as déjà conduit une moto ?

OLIVIER
À Montevideo, une fois, oui.

NICOLAS
Bah, monte.

NATHALIE
Je serais curieuse de te voir sur un engin pareil...

OLIVIER monte sur la moto.

OLIVIER
Très impressionnant.

OLIVIER démarre. Il embraie. L’engin le tire en arrière. Il s’éloigne à vive allure.

NATHALIE
Tu aurais dû lui donner ton casque.

NICOLAS
Tu parles ! Ici, il ne risque rien...

SCENE 45
ALLÀES DU CAMPUS ET EXTERIEUR CAMPUS - EXT/JOUR

OLIVIER roule à vive allure dans les allées du campus. En prenant de l’assurance, il prend aussi de la vitesse.

Bientôt, il arrive à la limite du campus. Les pelouses bien entretenues cèdent la place à un terrain vague. Un sentier vaguement bitumé traverse le terrain vague. OLIVIER s’y engage à très grande vitesse. Le compteur indique 150 km/h, 170 km/h, 190 km/h...

OLIVIER est complètement grisé par la vitesse. Il est heureux. Il roule ainsi pendant un long temps, droit devant lui...

Mais soudain son visage se durcit. Il se rend compte que la route est barrée quelques mètres devant lui par... des milliers de livres empilés, qui forment comme un mur !

OLIVIER accélère encore. Il fonce sur le mur, qui est très large et très haut... Il arrive dessus et le traverse brutalement, faisant voler les livres en éclats.

SCENE 46
BÂTIMENT DES ÉTUDIANTS - EXT/JOUR


OLIVIER revient vers ses amis. Il descend de la moto. Il est un peu troublé. Son front saigne légèrement, à l’endroit même où, dans la scène de la librairie, les livres en tombant de l’étagère cassée, l’ont blessé.

NATHALIE
Alors ?

NICOLAS
C’est plus excitant que la littérature, hein ?

NATHALIE
Tu es tombé ?

NICOLAS, soudain inquiet, inspecte sa moto sous tous les angles.

OLIVIER
Je me suis gratté...

NICOLAS
Eh ! Déconne pas ! T’es pas tombé ?

OLIVIER
Non, je te dis. Je me suis gratté.

NICOLAS
Il s’est gratté ! T’es bien le premier type que je connais qui se gratte en moto... (À Nathalie) Bon. A toi, maintenant.

NATHALIE
Oh non !

NICOLAS
Tu risques rien. Regarde Olivier...


OLIVIER s’écarte un peu de ses amis. Il est sous le choc.

NATHALIE
Non, non. Pas question !

NICOLAS
Écoute, Olivier l’a fait...

NATHALIE
J’ai peur, je te dis.

NICOLAS
Tu es ridicule...

NATHALIE
C’est toi qui es ridicule de mettre tout ton fric dans un engin pareil.

NICOLAS
C’est mon problème, ça !

OLIVIER n’en peut plus. Il se met hurler...

OLIVIER
Arrêtez !

NICOLAS et NATHALIE, surpris par l’intervention d’OLIVIER arrêtent net leur échange et se retournent vers lui.

SCENE 47
ESCALIER IMMEUBLE OLIVIER - INT/SOIR

[Au cours de cette séquence, alternent des scènes situées dans l’escalier d’Olivier et des scènes se déroulant à Montevideo]

OLIVIER rentre chez lui le soir. Il sort une enveloppe de la boîte aux lettres.

OLIVIER lit la lettre en montant l’escalier. C’est la voix de la GOUVERNANTE de la famille Alphandéry qu’on entend en off.

GOUVERNANTE (Off)
Monsieur, j’ai une bien triste nouvelle à vous annoncer. Je vous rassure tout de suite, elle ne concerne pas votre père. Son état de santé est stationnaire. Il se sent toujours très faible. Mais ce matin il a pu faire quelques pas dans sa chambre. Le malheur concerne Henri, notre chauffeur. Le drame s’est produit hier. J’avais besoin de l’envoyer chercher certains médicaments pour votre père...

SCENE 48
HALL MAISON MONTEVIDEO - INT/MATIN

[On « voit » ce que la gouvernante raconte]

La scène se déroule dans le hall d’entrée de la grande maison que possède le père d’Olivier dans la banlieue de Montevideo.

La GOUVERNANTE descend l’escalier monumental et appelle une domestique qui se trouve en bas, JULIETTE.

GOUVERNANTE
Juliette !

JULIETTE
Oui, Madame.

GOUVERNANTE
Savez-vous où se trouve Henri ? J’ai besoin de lui...

JULIETTE
Il est dans sa chambre, Madame. Il m’a dit qu’il ne se sentait fatigué.

GOUVERNANTE
Fatigué ? A son âge ! Merci Juliette. Je vais aller lui secouer les puces !

SCENE 49
ESCALIER IMMEUBLE OLIVIER - INT/SOIR

Retour dans l’escalier. OLIVIER continue de lire la lettre en montant.

GOUVERNANTE (Off)
Vous connaissez bien Henri. Il n’a pas l’habitude de ménager sa peine. La réponse de Juliette m’a surprise. J’ai voulu en avoir le coeur net.

SCENE 50
ESCALIER DE SERVICE MONTEVIDEO - INT/MATIN


[On « voit » la suite du récit de la gouvernante]

La GOUVERNANTE monte l’escalier de service, arrive à un palier, frappe à une des portes, celle d’Henri.

HENRI (Off)
Entrez...

SCENE 51
CHAMBRE HENRI, MONTEVIDEO - INT/MATIN

La GOUVERNANTE entre dans la chambre d’HENRI. Les volets sont ouverts. HENRI est allongé sur son lit, en livrée de chauffeur (tunique et bottes). Il a les traits de PIERRE, le jeune résistant (scènes avec le père et dans la rue).

GOUVERNANTE
Eh bien, Henri, vous ne vous sentez pas bien ?

HENRI fait un effort pour se redresser.

HENRI
Je ne sais pas ce qui m’arrive. Ça va passer.

GOUVERNANTE
Bien. Il faudrait que vous alliez me chercher quelques médicaments.

HENRI surmonte sa fatigue et s’arrache du lit. Debout, il chancelle un peu. Il est comme drogué par la fatigue.

GOUVERNANTE
Vous devriez vous coucher moins tard...

HENRI
Je me suis pourtant couché à dix heures ...

GOUVERNANTE
Bon. Allez. Voici l’ordonnance.

HENRI prend l’ordonnance et quitte la chambre avec la GOUVERNANTE qui l’observe, un peu inquiète.

SCENE 52
ESCALIER IMMEUBLE OLIVIER - INT/SOIR

OLIVIER, toujours dans l’escalier, lit la suite de la lettre de la gouvernante.

GOUVERNANTE (Off)
Quand il a pris la voiture, il avait l’air d’aller bien. Un peu fatigué mais, à son âge, on a des ressources...

SCENE 53
INTERIEUR VOITURE - EXT/MATIN

HENRI est au volant de la voiture. Il fait des efforts désespérés pour se tenir éveillé. Chaque mouvement est pour lui un supplice. Il se passe la main sur le front, se demandant ce qui lui arrive.

SCENE 54
ESCALIER IMMEUBLE OLIVIER - INT/SOIR

OLIVIER achève la lecture de la lettre.

LA GOUVERNANTE (Off)
Au bout de deux heures, il n’était toujours pas revenu. C’est la police qui nous a appris la terrible nouvelle. La voiture venait d’être retrouvée dans un fossé. On pense qu’il a eu un malaise, ou qu’il s’est endormi au volant. Bien sûr, c’est la fatalité mais je me dis que si je ne l’avais pas envoyé chercher ces médicaments, Il serait peut-être encore en vie. Naturellement, nous n’avons rien dit à votre père...

OLIVIER interrompt la lecture de la lettre. Il est arrivé au 4ème étage. Sur le palier, se tient une jolie jeune fille brune, aux cheveux très courts, ISABELLE. Elle est en train de reprendre son souffle. Ses mains sont encore accrochées aux poignées de deux normes valises.

ISABELLE
A quel étage sommes-nous ?

OLIVIER
(Après avoir regardé le mur du palier) D’après la tache... nous sommes au quatrième.

ISABELLE
J’ai fait le plus gros ! Ma chambre est au sixième.

OLIVIER
Celle de Monsieur Picard...

ISABELLE
Connais pas.

OLIVIER
Il est mort la semaine dernière.

ISABELLE
Me dites pas que j’ai loué la chambre d’un mort !

OLIVIER
Vous savez, l’immeuble date de la fin du XVIIIè siècle. Nous occupons tous des chambres de morts. Et puis, de toute façon, il est mort à l’hôpital.

ISABELLE
Ah ! J’aime mieux ça !

Elle lâche une de ses valises pour lui tendre la main.

ISABELLE
Je m’appelle Isabelle Turquier.

OLIVIER lui serre la main.

OLIVIER
Olivier Alphandéry.


Il tend le bras pour prendre la valise d’ISABELLE.

OLIVIER
Vous permettez ?

ISABELLE
Je dis pas non. Quand ça m’arrange, je ne suis plus du tout féministe.

Il soulève la valise.

OLIVIER
Vous transportez du plomb ?!

ISABELLE
Mes bouquins...

OLIVIER
Ah ?!

Ils montent ensemble l’escalier.

ISABELLE
J’arrive de Villard-de-Lans. Je cherche du travail.

OLIVIER
Quel genre ?

ISABELLE
Le genre pas fatiguant et bien payé.

OLIVIER
Ah...

ISABELLE
Je me suis dit que dans une grande ville comme Grenoble, ma flemme pourrait passer plus inaperçue. Dans les petits bleds, tout se sait.

OLIVIER
Vous savez taper la machine ?

ISABELLE
Ah ! Toujours la même question ! Oui. Mais d’un seul doigt. Et pas toujours le même ! Voyez, pas la peine d’en faire état.

OLIVIER
Si l’entends parler de quelque chose, je penserai à vous...

ISABELLE
C’est gentil.

OLIVIER arrive devant sa chambre.

OLIVIER
On est arrivés. Ma chambre est là. La vôtre, c’est celle-là...

ISABELLE vérifie le numéro de sa chambre sur le bout de papier.

ISABELLE
Exact. Bon, bah... Je vous remercie.

Un temps de gêne.

ISABELLE
Qu’est-ce qu’on dit, déjà, au cinéma, à ce moment-là ?

OLIVIER
Pour ?

ISABELLE
Pour dire quelque chose... Pour finir la scène ...

OLIVIER
Je crois que c’est à moi de parler... (Un temps, cherchant l’inspiration) Si vous avez besoin de quoi que ce soit, n’hésitez pas à frapper à ma porte.

ISABELLE
Par-fait ! Allez, salut !

OLIVIER
Salut.

OLIVIER et ISABELLE rentrent chacun dans leur chambre.

SCENE 55
CHAMBRE OLIVIER - INT/SOIR

OLIVIER referme la porte derrière lui et s’y adosse. Le vague sourire qu’il affichait en présence d’Isabelle disparaît. Il ressort la lettre de la gouvernante et termine sa lecture.

LA GOUVERNANTE (Off)
J’espère que cette terrible nouvelle ne vous affectera pas trop. Je sais que vous étiez très attaché à Henri. Il va nous manquer. L’enterrement aura lieu après demain, onze heures. Ayez une pensée pour lui... Je vous embrasse. Madeleine.

OLIVIER replie la lettre, la remet dans l’enveloppe et la pose sur son bureau. Il s’assied, sort de son tiroir une photographie où l’on voit Henri en livrée de chauffeur posant devant l’automobile de l’ambassade aux côtés d’Olivier.

Puis il range la photographie, sort son cahier et commence à relire les dernières pages écrites.

SCENE 56
ROMAN
FORET - EXT/NUIT

[On « voit » le passage que lit Olivier]

L’action de ce chapitre du roman d’Olivier se déroule la nuit dans une forêt. La caméra suit PIERRE qui dévide une bobine de fil électrique en courant. On aperçoit, derrière lui, au loin, des bâtiments vaguement industriels.

PIERRE saute derrière une butte. De l’autre côté, l’attendent MICHEL (sous les traits de GILLES, le gymnaste) et un AUTRE HOMME, dont on ne voit que les mains qui fixent le fil électrique à un déclencheur de bombe. On voit alors son visage : il a les traits de NICOLAS.

L’HOMME
Attention !

Les autres se couchent. L’HOMME appuie sur le déclencheur. On entend la détonation de la bombe et on voit le feu de l’explosion illuminer la forêt et les visages. PIERRE, MICHEL et l’HOMME lancent un bref « Hurrah ! » avant de décamper en emportant le déclencheur.

La caméra, qui les suit dans leur course, s’attarde sur le visage de l’HOMME (Nicolas).

SCENE 57
CHAMBRE OLIVIER - INT/NUIT


OLIVIER déchire la dernière page de ce chapitre et y met le feu avec une allumette.

SCENE 58
CHAMBRE OLIVIER - INT/MATIN

C’est le petit jour. OLIVIER est réveillé par un martellement insistant à la porte. Il se lève et va ouvrir. C’est NICOLAS. Il porte un survêtement. Il entre résolument dans la chambre.

NICOLAS
Allez, habille-toi ! On va courir !

OLIVIER
T’es fou ! Il est cinq heures du matin !

NICOLAS
Arrête de pleurnicher... Habille-toi !

OLIVIER
Mais qu’est-ce que je vais mettre ?!

NICOLAS
Ah, ces gonzesses...

NICOLAS ouvre l’armoire d’OLIVIER, fouille et en sort une paire de tennis qu’il brandit.

NICOLAS
Et ça, c’est quoi ?

OLIVIER est découragé.

SCENE 59
STADE - EXT/JOUR

OLIVIER et NICOLAS courent côte à côte sur la piste d’un stade. OLIVIER est habillé de façon un peu ridicule. Il suit sans effort le train de NICOLAS, qui ne va pas très vite. Il court maladroitement, avec beaucoup d’application et de sérieux, mais sans style.

Un peu plus tard, on les retrouve allongés sur la pelouse du stade. Avec un synchronisme parfait, auquel veille NICOLAS, ils exécutent des mouvements de musculation abdominale et autre...

Puis ils reprennent leur souffle. OLIVIER est au bord de l’asphyxie.

NICOLAS
Ça va ?

OLIVIER
J’en peux plus !

OLIVIER s’écroule sur la pelouse. NICOLAS éclate de rire.

NICOLAS
Faut souffrir pour plaire, mon p’tit vieux...

OLIVIER
Ça ne sert à rien...

NICOLAS
De plaire ?

OLIVIER
Non, de souffrir...

NICOLAS
Pour plaire ?

OLIVIER
(Vaincu) Oui...

NICOLAS
C’est toi qui le dis...

OLIVIER
Tu te casses la tête pour rien : les femmes préfèrent les types qui les font rire...

NICOLAS
Parce que tu crois que tu les fais rire !

OLIVIER
Je ne parle pas de moi. Je te dis, ça ne sert à rien...

OLIVIER se renverse de nouveau sur la pelouse. NICOLAS reste sur sa faim.

SCENE 60
IMMEUBLE OLIVIER - EXT/JOUR

Après la séance de jogging, NICOLAS dépose OLIVIER à moto devant chez lui. Ils se saluent. OLIVIER rentre dans son immeuble.

SCENE 61
ESCALIER IMMEUBLE OLIVIER - INT/JOUR

OLIVIER monte quatre à quatre l’escalier. Sur le palier du sixième étage, il tombe sur ISABELLE qui sort de sa chambre. Elle ne peut dissimuler une certaine surprise en voyant la tenue d’OLIVIER.

ISABELLE
Ouah ! Vous êtes matinal ! Chapeau ! J’ai beaucoup d’admiration pour les gens qui se lèvent tôt : les sportifs, les ouvriers agricoles, les éboueurs, tout ça, vous voyez ? Moi, c’est tout le contraire ! Je ne suis pas du matin. C’est pour ça que je ne sortirai jamais avec un éboueur. Vous... Je sais pas encore. A vous voir comme ça, J’ai l’impression que le sport, c’est quand même pas vraiment votre truc...

OLIVIER
Je n’ai qu’un ami dans cette ville, et il est très sportif, vraiment très sportif. Alors, je m’adapte. Et vous ? Vous rentrez ou vous sortez ?

ISABELLE
Je pars...J’ai un rendez-vous.

OLIVIER
Un travail ?

ISABELLE
Peut-être, oui...

OLIVIER
Vous me direz... ?

ISABELLE
Promis. Tchao !

ISABELLE disparaît dans l’escalier. OLIVIER entre dans sa chambre.

SCENE 62
REVE
CHAMBRE DES MANUSCRITS - INT/JOUR

[On « voit » le rêve d’Olivier]

Le rêve d’OLIVIER se déroule dans une pièce de dimension moyenne, carrée et sans fenêtre. La seule lumière provient du feu qui brûle dans la cheminée. Les murs de la pièce sont couverts d’étagères blanches remplies de livres aux tranches claires. Elles ne vont pas jusqu’au sol, elles reposent sur des placards, blancs eux aussi.

Au milieu de la pièce, pour seul mobilier, il y a une table et une chaise.

OLIVIER est assis à la table et écrit. Il est seul au début du rêve mais soudain, sans qu’on sache quand il est entré, apparaît un autre personnage qui a les traits de Gilles, le gymnaste.

GILLES
(Sur un ton de reproche) Tu travailles encore ?

OLIVIER
Il faut que le finisse mon roman.

GILLES
Tu le finiras plus tard ! Viens dehors, il y a du soleil.

OLIVIER
J’en ai rien à faire du soleil. Il faut que je finisse mon roman.

GILLES
Tu vas t’asphyxier ici. Viens dehors, il y a de l’air.

OLIVIER
Je m’en fous. Je n’ai pas de temps à perdre.

GILLES
T’as vu ta gueule de déterré ? Viens dehors, il y a de l’espace.

OLIVIER
Laisse-moi tranquille ! J’ai du travail.

GILLES
Ça ne sert à rien...

GILLES s’est approché de la table. Il semble décidé à user de tous les moyens, même des plus violents, pour arracher OLIVIER à son travail.

OLIVIER
Je n’ai pas de temps à perdre.

GILLES
Ça ne sert à rien, je te dis !

GILLES lui arrache le stylo des mains.

OLIVIER
Arrête ! Rends-moi ça. Tu n’as pas le droit !

GILLES
Je te dis que ça ne sert à rien. A rien.

De plus en plus violent, GILLES, tandis qu’OLIVIER tente de récupérer son stylo, s’empare du manuscrit d’OLIVIER et va le jeter dans le feu. OLIVIER tente en vain de l’en empêcher. Il s’agenouille devant le feu pour sauver des flammes ce qui peut encore l’être. GILLES en profite pour ouvrir tous les placards et les vider des milliers de feuilles qu’ils contiennent.

OLIVIER
Arrête !

Des milliers de feuilles jonchent le sol et volent dans la pièce. GILLES les attire vers le feu (on dirait, en fait, qu’elles s’y précipitent d’elles-mêmes). OLIVIER, au comble du désespoir, assiste avec impuissance à la catastrophe...

Dans un sursaut d’énergie, il empoigne GILLES et tente de l’immobiliser. Mais GILLES est plus fort que lui et la lutte tourne court. OLIVIER essaie alors de retenir les papiers qui se précipitent d’eux-mêmes dans le feu.

OLIVIER reprend la lutte. GILLES esquive un de ses assauts et OLIVIER bascule dans les flammes.

SCENE 63
TERRAIN D’AVIATION - EXT/JOUR

C’est un dimanche ensoleillé de la fin de l’hiver.

Sur un terrain d’aviation, OLIVIER et NATHALIE assistent, avec d’autres spectateurs, à un concours de saut en parachute. Un speaker annonce au haut-parleur les noms des différents concurrents au fur et mesure qu’ils sautent.

Bientôt, vient le tour de NICOLAS. On suit sa descente jusqu’au moment où il touche le sol au beau milieu de la cible. La foule applaudit.

Il replie la toile, ôte son casque et quitte la cible en saluant les spectateurs. Alors que NATHALIE affiche sa joie de voir son ami gagner le concours, OLIVIER, lui, observe NICOLAS d’une façon inamicale.

SCENE 64
CHAMBRE OLIVIER - INT/SOIR

OLIVIER est assis en tailleur sur son lit, face aux étagères, qu’il fixe intensément. Il entretient avec ses livres son habituelle conversation silencieuse...

Elle est interrompue par un coup de sonnette. OLIVIER se lève et va ouvrir. Sur le seuil, il découvre NICOLAS et NATHALIE. NICOLAS tient un énorme paquet dans ses bras.

NATHALIE et NICOLAS
Bon anniversaire !

OLIVIER les fait entrer dans la chambre. Il est très ému. NICOLAS lui tend le paquet. OLIVIER s’installe sur le lit pour l’ouvrir.

OLIVIER
Vous êtes fous !

OLIVIER défait le paquet. NATHALIE retire son manteau et s’assied sur le lit côté de lui.

NICOLAS
Ça va sûrement te plaire...

NATHALIE
Ça m’étonnerait... M’enfin, ouvre...

OLIVIER
(Continuant d’ouvrir le paquet, à Nathalie) Pourquoi tu dis ça ?

NATHALIE
Pour rien... Tu verras...


OLIVIER a retiré le papier cadeau. Il ouvre le paquet et découvre son contenu. Sa mine change soudain. Surprise, puis déception, enfin une immense hilarité (feinte ?). Lentement, il sort du paquet, en le tenant du bout des doigts, un maillot d’athlétisme aux couleurs criardes.

OLIVIER
C’est pas vrai !

OLIVIER replonge dans le paquet et retire de la même manière un short aux couleurs guère plus discrètes.

OLIVIER
C’est pas vrai !

Nouvelle plongée dans le paquet : il en sort des sprint-courts.

OLIVIER
C’est pas vrai !!!

NATHALIE
C’est ta pointure, au moins ?

OLIVIER regarde l’intérieur des sprint-courts.

OLIVIER
Si, si. C’est ça.

NICOLAS
Comme ça, mon vieux, tu n’auras plus d’excuses... Ça te plaît au moins ?

OLIVIER
(Faisant bonne figure) C’est surprenant.

NICOLAS s’empare du maillot.

NICOLAS
Tu vois, ce maillot, c’est pas n’importe quel maillot. C’est celui que j’avais quand j’ai remporté ma première compétition officielle. À treize ans.

OLIVIER encaisse bien le coup. NATHALIE essaie de le rattraper...

NATHALIE
C’est ce qu’on appelle un témoignage d’amitié.

OLIVIER
Je vous remercie tous les deux.

NATHALIE
Attends !... Ça, c’est son cadeau...

Elle sort de la poche de son manteau un petit paquet.

NATHALIE
Ça, c’est le mien.

OLIVIER
Qu’est-ce que c’est ?

NATHALIE
Ouvre...


OLIVIER retire le papier d’emballage. Il le fait avec une certaine impatience. Du paquet, il sort enfin un encrier en forme de sprint-court. Cette fois, il rit de bon cœur...

OLIVIER
Superbe.

Il embrasse NATHALIE.

SCENE 65
CHAMBRE OLIVIER - INT/NUIT


OLIVIER est seul dans sa chambre. Il saisit une des sprint-courts et la lance avec rage contre les étagères. Sous le choc, quelques livres tombent. Il se précipite pour les ramasser et vérifie qu’ils n’ont pas subi de dommages. Puis il les replace.

Il va ensuite s’asseoir à sa table de travail, sort son cahier et se met à écrire.

SCENE 66
ROMAN
VOIE FERREE - EXT/NUIT

[On « voit » ce qu’écrit Olivier]

La scène se passe de nuit, sous une lune absente. PIERRE (autrement dit HENRI, le chauffeur), MICHEL (autrement dit GILLES, le gymnaste) et un troisième HOMME sortent d’une forêt et, avec beaucoup de prudence, courent vers une voie ferre. Au loin, près d’une gare, on aperçoit un signal, qui est au vert. Sans rien se dire, PIERRE et MICHEL se placent aux deux extrémités d’un rail et commencent à le déboulonner tandis que l’HOMME (qui n’apparaît, pour l’instant, qu’en silhouette anonyme) va faire le guet.

Quand les boulons sont retirés, les TROIS HOMMES enlèvent le rail. A quelques centaines de mètres de là, un signal, privé de courant, s’éteint sans qu’ils s’en aperçoivent. Les TROIS HOMMES, ensemble, commencent à déboulonner l’autre rail.

Au loin, sur la voie ferrée, près de la gare, apparaissent, tirés par des chiens, des SOLDATS allemands. L’arrêt du signal lumineux leur a donné l’alerte. Les TROIS HOMMES continuent leur travail sans se douter de l’approche de l’ennemi.

Mais soudain, PIERRE aperçoit les SOLDATS.

PIERRE
Les Boches !

MICHEL
Merde ! Le signal ... ! On a coupé le courant !

PIERRE
Filons !

Les TROIS HOMMES s’élancent vers la forêt. Les SOLDATS parviennent l’endroit où la voie a été coupée. Tandis que deux SOLDATS remettent en place les rails, les autres, tirés par les chiens qui ont flairé la trace des fuyards, s’enfoncent dans la forêt.

Une poursuite s’engage.

Les SOLDATS, quand ils sont à portée des TROIS HOMMES, déchargent sur eux leurs mitraillettes. L’un d’eux, le TROISIEME, tombe, tandis que PIERRE et MICHEL réussissent à échapper à la mort et à leurs poursuivants. On découvre alors que l’HOMME abattu a les traits de NICOLAS.

SCENE 67
CHAMBRE OLIVIER - INT/NUIT

Cette fois, OLIVIER ne déchire pas ce qu’il vient d’écrire.





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