La ville de Villiers-sur-Marne, dans le Val-de-Marne, au sud-est de Paris, a souhaité apporter une réponse à cette question : comment la problématique de l’écologie est-elle perçue dans les milieux populaires et notamment dans un des quartiers les plus sensibles de la ville, le quartier prioritaire des Hautes Noues ?
Au niveau national on sait que l’écologie peine à s’imposer dans les esprits. On a même constaté un recul à ce sujet dans les partis politiques à l’occasion des récentes élections européennes et législatives. La crise des agriculteurs de janvier 2024 a montré par exemple la volonté des pouvoirs publics de ne pas alourdir les contraintes environnementales qui pèsent sur cette profession déjà corsetée par des règles et des contraintes diverses. L’écologie est de plus en plus perçue comme « punitive », bien que le dérèglement climatique se manifeste chaque jour davantage, avec la multiplication de périodes caniculaires, d’incendies de forêt, d’orages apocalyptiques, de pluies diluviennes. Sans parler de la disparition d’espèces, de l’épuisement des ressources et de la pollution des eaux, des océans, de l’air, etc.
Si, donc, dans les populations les plus au fait des enjeux environnementaux, l’écologie passe mal, comment les habitants des quartiers populaires la perçoivent-ils et la vivent-ils au quotidien ?
À première vue, l’augmentation du prix de l’énergie, notamment de l’électricité, constitue l’essentiel de leur problématique écologique. Il faut dire que l’inflation récente a fait grimper les factures et les familles réagissent. La maîtrise énergétique devient alors un enjeu économique prioritaire dans des foyers où chaque euro compte. D’où l’adoption d’éco-gestes au quotidien, seul moyen pour les habitants des quartiers de faire baisser la facture, et au moins de la contenir, dans un contexte économique où la hausse du coût de la vie n’a pas été compensée par des hausses de revenus.
Encore faut-il initier ces populations à ces gestes d’économie. Et ce n’est pas simple. Les habitants de ces quartiers ont des urgences immédiates, souvent financières, qui passent avant la recherche de gestes utiles à la planète… et parfois même au porte-monnaie. Ils ont tendance à privilégier dans leurs achats un gain immédiat à une économie à plus long terme sur la facture électrique. Ils investissent parfois dans des appareils gros consommateurs d’énergie mais moins chers que des produits plus « verts ».
Il y a aussi la barrière de la langue. Certains de ces habitants ne lisent pas assez bien le français pour comprendre le sens de certaines étiquettes qui pourraient les aider à faire le bon choix. Et parfois aussi, pour ceux qui viennent de l’étranger, les réflexes acquis dans leur pays d’origine ne sont pas toujours adaptés à une bonne approche de la question environnementale.
C’est pour ces raisons qu’une habitante du quartier des Hautes Noues, Mamou Soumaré, aidée par le service de Médiation Prévention de la ville de Villiers-sur-Marne, sous la houlette de Tarek Ben Mansour, a décidé de lancer une initiative, l’association « DPF », pour « Développement, Potentiel Formation », dont l’un des volets est d’initier aux « bons gestes » les volontaires qui suivent ses ateliers, à charge pour eux, ensuite, de porter la bonne parole auprès des habitants des Hautes Noues et d’ailleurs.
Nous commencerons par décrire cette association et le contexte local dans lequel elle se déploie, nous verrons ensuite les partenaires qui la soutiennent : la mairie mais aussi le géant suisse de l’électricité, Primeo Energie. Nous nous intéresserons ensuite au profil atypique des « volontaires » qui participent aux ateliers et animations de l’association. Puis nous analyserons la problématique de l’écologie auprès des populations des quartiers populaires. Nous verrons quelle place elle prend, ou ne prend pas, dans l’ensemble des problèmes économiques et sociaux qu’elles ont à gérer au quotidien. Enfin, nous nous pencherons sur les actions qui pourraient être menées pour les sensibiliser davantage aux questions environnementales.